Le confort 1931 a donné son esthétique à la vie intime de 1931. C'est pour la première fois la fonction qui crée le décor et lui impose sa netteté décorative et non le décor qui soumet à ses caprices arbitraires les objets qu'il enveloppe. La belle ligne des automobiles est née, non des caprices d'un artiste, mais du raisonnement pratique d'un mécanicien. Le décor du confort moderne est obligé de rompre avec toutes les anciennes lois de la décoration d' appartement. Le tube de cuivre nickelé, le fil de laiton, la lampe pleine de lumière éblouissante, tout cela finit par trouver ses formes à peu près définitives tant que l' élément qui les utilise restera ce qu' il est. De plus en plus, l' oeil humain s' habitue à la noble simplicité des lignes et des objets. Ce triomphe sur nos goûts traditionnels fut la plus belle conquête esthétique de 1931. Nos yeux gardaient jalousement les images anciennes des décors qui ne protégeaient rien, si ce n' est la tradition d' un confort strictement intellectuel.
De plus en plus la collaboration des grands éléments de la
nature pénétrera dans notre existence sous un aspect toujours plus discret. Les anticipations décoratives tenteront éternellement ceux que la curiosité de l'avenir tourmente sans arrêt. Tout ce que le génie de l'homme inventera pour atteindre la perfection confortable contribuera à édifier des paysages nouveaux que l'imagination des artistes ne peut encore prévoir.
nature pénétrera dans notre existence sous un aspect toujours plus discret. Les anticipations décoratives tenteront éternellement ceux que la curiosité de l'avenir tourmente sans arrêt. Tout ce que le génie de l'homme inventera pour atteindre la perfection confortable contribuera à édifier des paysages nouveaux que l'imagination des artistes ne peut encore prévoir.
L'ingénieur, le mécanicien, le maître des champs ensemencés détiennent les secrets futurs qui composeront le pittoresque des temps à venir. Tout le pittoresque mondain de notre avenir naîtra d'une épure. Il est donc nécessaire de ne point perdre son temps à comparer le présent avec le passé si l'on veut garder quelques notions d'équilibre dans le jugement. Les influences du passé, qui se manifestent parfois quand le goût du présent n'a pas trouvé le sens unique de la marche, ne sont qu'anecdotiques. Elles ne peuvent rien contre l'irrésistible besoin de confort qui domine tous les hommes.
Un jour, ou un soir, dans un ciel de civilisation mélancolique, la terre apparaîtra ceinturée d'une inconcevable tuyauterie de nickel. Cette terre si aimée utilisera enfin son vieux et originel chauffage central dont jusqu'ici nous n'avons connu que les retours de flamme.
Pierre MAC ORLAN.
Il s' agit de photographies extraites de "CONFORT", et attribuées, bien qu' anonymes à la photographe Germaine Krull.
Plaquette publicitaire de luxe au profit de la Société Générale de Fonderie 1931.
Collection Versus.
Ce message est une réponse faite en prolongement d' un passionnant billet de la " République des Livres " de Pierre Assouline http://passouline.blog.lemonde.fr/2011/12/20/pierre-mac-orlan-voyait-la-vie-en-noir-et-blanc/
Et voici, rajoutée, une photographie d' un calorifère, une révolution domestique à cette époque (1930).
Beau comme une calandre d' automobile de luxe!
Intéressant ces baignoires et cette salamandre en fonte émaillée. L'économie de la fonderie alliée à l'esthétisme la forme sans gaspillage de matière, ou quelques retouches tout au plus.
RépondreSupprimerMac Orlan, curieusement j'étais il y a peu à St-Cyr/Morin j'aime m'y dégourdir les jambes dans cette lègère côte.
Merci pour cet article.
C' est la naissance bourdon, dans les années trente d' un art fonctionnel, d' une nouvelle typographie, d' un nouveau regard photographique à l' échelon industriel et non plus seulement au sein des milieux artistes.
SupprimerCette réalisation en est un exemple emblématique, typique.
Belle soirée à vous.
(Je vous fais un commentaire grâce à une connexion à mon ancien blog de Blogger qui n'est plus alimenté.) Je ne connaissais cette facette de Mac Orlan. Aurait-il trouvé notre époque - les temps à venir - pittoresque ? :)
RépondreSupprimerBienvenue Snake0644.
SupprimerVous voyez, ça marche!
Mac Orlan, je crois aurait trouvé notre époque plutôt exaltante que pittoresque.
Et le texte soumis ci-dessus à la lecture peut se discuter sur certaines de ses affirmations. Notamment la problématique de l' adaptation de la forme d' un objet à sa fonctionnalité. L' art nouveau ( 1900), l' art des cavernes ( pour le dire grossièrement) adaptaient l' objet à sa fonctionnalité.
Il est évident que notre auteur force le trait pour nous "faire passer" le confort de commande!
Merci encore de votre visite.
A bientôt!
Que veut-il dire ? "chercher le confort, l'épure"... Joie du regard, jubilation même mais souvent inconfort pour le corps.
RépondreSupprimerOui le billet de Pierre Assouline était passionnant, émouvant.
Quelle vie ! que de voyages dans l'univers de l'écriture et de l'art. Homme méconnu...
Il y a dans ce texte une énigme... lui qui a souvent vécu rudement et écrit des romans inoubliables comme l'Ancre de Miséricorde, Quai des brumes, des chansons pour Gréco, Morelli. Petit Morgat du bateau-Lavoir...
Le lien entre écriture et cette artiste-photographe aimant tant les lignes géométriques semble une piste imaginaire pour passagers prêt à tirer de la cale, la dernière ancre, l'ancre de miséricorde...
Je cherche Mac Orlan dans ce texte... qui ravirait des designers...
Nous sommes dans l' efficacité industrielle Christiane. Il faut rogner les détails inutiles, les efflorescences art nouveau qui sont en trop. Conditionner le caractère typographique au sens du texte, dans une disposition graphique qui fait suite à la mise en espace Mallarméenne.
SupprimerC' est à cet effet que j' ai mis en ligne la page typographique si typique de ces années trente, comme une suite aux découvertes et mise en place du Bahaus.
C' est l' explosion du design, effectivement!
Bonsoir à vous!
Oui, je vous suis, Jean-Marie mais il y a autre chose encore, plus loin, une espèce de dessaisissement des contraintes antérieures, un déploiement vers une abstraction, un vide (le Bahaus...), un (re)commencement,un refus, l'exploration d'une origine, un trait, un unique trait. Oui, la place de l'homme dans le monde est interrogée dans cette recherche graphique. Mais je sens Mac Orlan démuni, en quête d'une issue. Après il n'y a plus que ce qui ne se voit pas... Vide opposé au plein, au trop plein... Merci de vos réponses toujours stimulantes.
SupprimerVous savez Christiane- tiens, cette nouvelle fonctionnalité de notre hébergeur me permet de vous répondre à la suite!- il me semble que Mac Orlan adhère de façon enthousiaste à cette avancée des nouvelles techniques. Précurseur dans l' édition de livres de photographes et de photographie, grand amateur de livres d' artistes(voir sa fréquentation des surréalistes)il note dans l'extrait mis en ligne ci-dessus,un progrès qu' il veut poétique à sa façon:" Un jour, ou un soir, dans un ciel de civilisation mélancolique, la terre apparaîtra ceinturée d' une inconcevable tuyauterie de nickel".
SupprimerNe pourrait-il dire avec nous aujourd'hui, que notre "terre apparait ceinturée d' une inconcevable tuyauterie" d' informations numériques, textes, sons et images?
Bien à vous.
Cela m'intéresse beaucoup. (P. Assouline évoquait sa passion pour la photographie). Voilà un Mac Orlan que je ne pressentais pas... Peut-être voulais-je garder la bohême montmartroise et les petits cafés des ports bretons... les voyages au pays des brumes, les chansons émouvantes ? Merci.
SupprimerPS :la typographie de la couverture est superbe et j'aime ces deux photos !
SupprimerJe rajoute Christiane, une autre photographie extraite de "Confort"..
Supprimersuperbe travail !
Supprimerbonsoir, tard, j'aime regarder les pantoufles sur le radiateur, avant qu'elles ne fontent ...
RépondreSupprimersur l'aire de" j'aime regarder les filles"
Ces chaussures en matière plastique, quelle drôle d' idée, en effet de les mettre sur le feu!
SupprimerCela m' a aussi intrigué Capucine.
...Il n' est jamais trop tard pour bien faire!
J' aimerais évoquer la typographie de ce livre que je peux toucher à l' instant. Belle inventivité qui tient la route face à la platitude du caractère numérique.
Que voulez-vous, j' aime les livres dont la typographie vous envoie dans les décors!
A demain!
Cette plaquette me fait irrésistiblement penser aux documents de présentation du paquebot Normandie, dont la construction a débuté en 31 je crois, que les artistes de l'époque avaient été appelés à habiller. Il y a un très beau texte de Cendrars sur le paquebot, qui résonne, de mémoire, avec celui de Mac Orlan.
RépondreSupprimerBonjour Phil Dos et bienvenue à vous!
SupprimerMac Orlan, comme vous le savez, a multiplié les plaquettes publicitaires à base de photographies de son époque en faisant appel à des photographes contemporains peu ou pas connus pour certains.
Il est passé du livre d' artiste à base de gravure à la mise en avant de la photographie comme forme artistique complète en soi.
Il ne fut pas le seul et ce passage est loin d' être anodin.
Belle journée à vous et à bientôt!
L'article est très intéressant et les photos choisies superbes! La façon de "travailler", de promouvoir a bien évolué depuis les années trente.
RépondreSupprimerCette période-là fascine énormément. En photo surtout comme vous l'écrivez ci-dessus. Photographie artistique et de mode.
Bon weekend!
C' est effectivement le grand boom de la photo que ces années là!( J'y pense d' autant plus que l' on vient d' annoncer la fermeture des usines Kodak,et le souvenir de mon premier appareil photo dans les années soixante...)
SupprimerLa photographie devenait une " nouvelle vision du monde" comme l' écrivaient les critiques à l' époque.Et malgré une application industrielle et publicitaire, elle restait un travail d' artiste et avait du mal encore à s' imposer face à la photo "pictorialiste".
Merci de vos remarques et beau week-end!
Pour une analyse de ce que l' on a appelé:
RépondreSupprimerNOUVELLE VISION, NOUVELLE PHOTOGRAPHIE
" Dans sa préface au volume Photographie (AMG, 1930), Waldemar George, sous le titre « Photographie, vision du monde », reprend l'argumentation d'un Moholy-Nagy quant à la photographie « mise en pratique d'une idée, d'une conception du monde », «poussée créatrice », « magie moderne », qui « s'assujettit le monde des apparences » avec le photogramme, la photographie abstraite, la découverte de l'objet, la connaissance tactile, le gros plan, les vues plongeantes, les perspectives plafonnantes, la force domptée de la machine (termes employés par W. George), les « objets vus en trompe l'œil, plus exacts, plus précis, plus concrets que les objets réels ; objets déformés, brisés par la lumière et par la perspective », photographies nocturnes et négatifs (« images spectrales du monde »), sans oublier les photographies scientifiques, radiographies et micrographies, auxquelles le volume fait une large place. Tandis que la suite des reproductions s'ouvre sur des cristaux, diatomées, taches solaires, spectres de dispersion, photogrammes et macrophotographies, apparaissent Biermann, Bur-chartz, Moholy-Nagy, Stankovski, Renger-Patzsch, Munkacsi, mais aussi les principaux « nouveaux photographes » parisiens, Germaine Krull, Eli Lotar, Florence Henri, Roger Parry, Maurice Tabard (8 photographies), Sougez, Zuber, Vigneau, Kertész (plan rapproché d'une fourchette) aux côtés de Steichen et Sheeler (les usines Ford). Waldemar George a cependant pris soin de placer cette photographie moderne dans la perspective de la tradition photographique française que, dans une longue partie du texte, il fait remonter à Niépce, Daguerre, Nadar, et surtout Atget, mort en 1927, dont l'œil photographique est, dit-il, « révélateur d'un monde plus que réel » grâce à une « écriture franche, crue et directe ». Sans doute l'impact de la Nouvelle Photographie en Europe est-il parfaitement représenté par Germaine Krull, à qui ses origines germaniques, son goût du voyage et sa formation cosmopolite donnent une stature européenne ; elle a appris la photographie à Munich, s'est installée brièvement à Berlin en 1920 (studio de portraits), a séjourné en Hollande de 1921 à 1924 (elle épousa le cinéaste Joris Ivens), se trouva en France à partir de 1924, fournit des photographies à de nombreux journaux européens, devint responsable de la photographie pour la France libre en 1940. Typiquement formée par la Nouvelle Vision, elle en applique les principes dans une activité journalistique qui lui permet de vivre de son métier. Elle avait publié Métal, un portfolio consacré à l'architecture de fer en 1927 (Paris, Calavas), puis 100 x Paris (Berlin, Verlag der Reihe, 1929) où abondent les vues plongeantes de rues ou de grands magasins(...)"
Michel Frizot, Nouvelle Histoire de la Photographie Bordas/Adam Biro éditeurs 1994.
passionnant !
RépondreSupprimerJe vous conseille cette Histoire de Michel Frizot, Christiane, qui est un regroupement des analyses de divers spécialistes de la photographie, philosophes d' art.. etc..Une Bible dans sa spécialité!
SupprimerAdoro il bianco/nero e amo fotografare i particolari.
RépondreSupprimerBuona domenica.
Sandra
Oui Sandra, le noir comme le blanc à son zénith!
SupprimerBeau dimanche à vous aussi.
Je crois me souvenir d'une exposition vue au début des années 90 au Grand Palais à Paris - Design miroir du siècle - où l'on voyait en un regard les objets s'arrondir, les formes viser la pureté, les couleurs se fondre dans le blanc et le noir. Et le confort en ligne de mire.
RépondreSupprimerUn très beau post !
Hélas pour moi, je n' ai pas vu cette exposition..
SupprimerMerci de votre passage et de vos compliments!
A bientôt.
bonjour ! je me demande s'il n'y a pas une pointe d'ironie dans ce texte, en tout cas, il est mystérieux... et comme je suis une nostalgique de la chaleur des pierres et du bois, je me plais à entendre là une sorte de moquerie déguisée... j'ai tout faux ? tant pis :)))
RépondreSupprimerPeut-être pas de l' ironie k.role, mais sûrement de la nostalgie du romancier de L' ancre de miséricorde.
SupprimerIl aime ce nouveau monde, il n' est pas dupe ( ce qui serait alors une pointe d' ironie?)et possède la qualité précieuse de pouvoir s' émerveiller d' un objet quotidien.
Je vois que vous êtes arrivée à bon port.
Merci de votre cordial passage, à bientôt!
J'ai admiré un certain confort en moire et banc ...
RépondreSupprimerHeureuse de vous retrouver en Aime Haut, Versus !