Collage, œuvre originale de J.M. Staive. |
(« devenir une sorte de générateur à rayonnement constant " ) Yves Klein.
A la lecture du Journal de Delacroix, Klein mesura, semble-t-il, l'importance du charisme de l'artiste dans la société. Dès la fin des années cinquante, Delacroix mais aussi Van Gogh allaient incarner la figure du génie au siècle précédent. Il se trouve que la correspondance de Van Gogh à son frère Théo fut rééditée en 1956 par les éditions Gallimard, trois ans après la parution d'une monographie par Charles Estienne . Klein se plaît à citer Van Gogh qu'il considère avec Delacroix comme l'un des artistes de la pensée monochrome dont les écrits resteraient le plus authentique témoignage. Leurs livres seraient leurs chefs-d' oeuvre. Or les genres littéraires de ces deux ouvrages sont comparables : le journal et la correspondance servent normalement à exprimer de manière sensible et directe une expérience de la vie quotidienne. Delacroix écrivait sa vie pour lui-même et Van Gogh l'écrivait à son frère.
Considérant cette relation de l'écrit d'artiste à la vie, Yves Klein fait l'hypothèse d'une réduction radicale. Si la vie de l'artiste s'expose à travers l'écriture et non plus la peinture, cette vie n'est-elle pas le sujet ultime de l'art qu'il faudrait libérer de toute perturbation formelle ? En un mot Klein propose de supprimer et la peinture et l'écriture au bénéfice d'une existence pure, une existence non agissante. Dans un élan vers un hypothétique futur, il se risque à cette confidence :
« A vrai dire, ce que je cherche à atteindre, mon développement futur, ma sortie dans la solution de mon problème, c'est de ne plus rien faire du tout, le plus rapidement possible, mais consciemment, avec circonspection et précaution. Je cherche à être " tout court ". Je serai un " peintre ". On dira de moi : c'est le "peintre". Et je me sentirai un " peintre", un vrai justement, parce que je ne peindrai pas, ou tout au moins en apparence. Le fait que "j'existe" comme peintre sera le travail pictural le plus "formidable" de ce temps? »
Nicolas Charlet. L' emprunt d' Yves Klein à Eugène Delacroix : l' empreinte.
in L' empreinte, Mille Sources éditeur sous la direction de Y. Beaubatie, Tulle 2004.
Notes sur Yves Klein , Centre Pompidou, Paris.
Ses paroles lui furent assez prémonitoires
RépondreSupprimer(sinon prophétiques): à la sortie du film où il pensait être encensé et où, contre tout attente, il fut conspué par un pauvre réalisateur-journaliste qui n'avait apparemment rien compris de sa démarche, le repos éternel l'attendait et prit la forme d'une crise cardiaque
Tout à fait exact Simon Gaetan .
RépondreSupprimerEt commença alors la légende Yves Klein !
Merci de votre passage.
Passionnant ! Même si, a priori, une oeuvre parle seule, la découvrir tout en découvrant "qui" est son auteur lui donne souvent des dimensions nouvelles. On n'en finit pas avec "La Psychanalyse de l'art"... ou l'histoire...
RépondreSupprimerYves Klein reste pour moi un mystère encore...
be' pero'.....niente male!
RépondreSupprimer@ Le blÖg d' Ötli,
RépondreSupprimerJ' ai mis en lien les notes très complètes du Centre Georges Pompidou à propos de Yves Klein.
A bientôt !
Yves Klein ....with love!
RépondreSupprimer@Sabrina,
RépondreSupprimerSicuro !
@Kristin,
RépondreSupprimerI agree with you, especially when he tried to fly !
Have a good day.
très drôle Monsieur Klein!...après casser la croûte...ça va bien!! être peintre ...et mourir...du grand art!je suis consciente de mon premier degré! mais ne rien faire!!??quand l'envie de vous exprimer vous démange.....sacrilège..générateur à rayonnement constant...c'est quoi le charisme d'un artiste ??
RépondreSupprimerLe texte ci-dessus est un extrait du travail très original de N. Charlet qui a mis en évidence l' influence décisive de Delacroix .
RépondreSupprimer" Si l' on s' en tient à l' influence de Delacroix, on repère cinq thèmes principaux dans les écrits de Klein : l' écrivain figure emblématique de l' artiste, le peintre comme existence non agissante, la méthode de la flânerie et de l' impression sensible du moment, la priorité absolue de la couleur, enfin la proposition d' une forme de matérialisme mystique."
L' étude de M. Charlet vise à montrer que ces cinq thèmes gravitent autour de la notion d' empreinte.
" L' empreinte, systématiquement associée à l' héritage de Delacroix, fonde la théorie et la pratique de la monochromie d' Yves Klein.
Cette base tant conceptuelle qu' intuitive sera le fil conducteur de son œuvre, des monochromes au vide ( empreinte de la sensibilité immatérielle ), des anthropométries ( empreintes des modèles ) aux cosmogonies ( empreinte de la pluie et du vent ), des peintures de feu ( empreinte de la flamme ) aux moulages ( empreinte de son entourage direct et des chefs-d' œuvre de la statuaire grecque )."
Voilà pour le charisme en action Gwendoline !
Bien bonne soirée.
Etre , devenir hêtre pour apparaître sur la toile vestale ... Déposer des couleurs , elles ne seront pas leurres mais est-ce la bonne heure pour ne rien faire sans heurt ?
RépondreSupprimerrire
Me voilà dans ma minute délire ^^:) (désolée )
J'aime beaucoup le collage de JM Staive :)
Douce soirée et ravie de pouvoir re visiter votre espace ! :)
@marie,
RépondreSupprimerVous voir en superforme fait plaisir à lire !
Les motifs des mots tissent la toiles du sens.
...cela s'appelle "sauter dans le vide" ...
RépondreSupprimerSi on me dit " je suis peintre" , je réponds prouve- le! C' est mon petit côté Saint Thomas...
RépondreSupprimerje trouve cela assez paradoxal .... l'on s'habille si souvent de costumes qui ne nous vont pas pour satisfaire les besoins nécessaires à nos existences (factures, nourriture, etc ....) Et voilà qu'un grand peintre ne se sent plus être en peignant ? Est-ce que la notoriété lui fait percevoir son métier non plus comme une passion, une vocation, mais comme un "devoir" ? Là où cela me paraît paradoxal, c'est que la plupart des artistes (ceux qui ne peuvent vivre entièrement de leur art) se sentent obligés de se lever le matin pour aller faire un travail moyennement/pas du tout passionnant.
RépondreSupprimerOn pourrait imaginer que cela soit un luxe de pouvoir vivre de son art .... de pouvoir enfin s'épanouir pleinement de sa passion ...
@Arthémisia,
RépondreSupprimerLe saut dollard !
@orfeenix,
RépondreSupprimerla mort de l' art !
( Sauter réellement dans le vide...)
Il se sent tellement peintre, Lise, qu' il ne peut plus peindre " comme avant " !
RépondreSupprimer( Il donna des cours de judo pour gagner " matériellement " sa vie...)
Il est la peinture...
Voir la très belle analyse du critique Pierre Restany, son ami :
Nul besoin de crier au miracle pour tenter d'expliquer le pouvoir de rayonnement d'Yves Klein. Ce mystique était un réaliste du futur. Ce maître du judo en qui se mêlaient les sangs provençaux, hollandais et malais, complet autodidacte pictural bien que né dans une famille de peintres, a ordonné son œuvre autour d'une intuition réaliste fondamentale : à un monde nouveau correspond un homme nouveau. A l'aube de la seconde révolution industrielle, nous nous acheminons vers un nouvel humanisme. Les mutations qui affectent l'espèce intéressent au premier chef le domaine de la sensibilité, de l'émotion, de la perception. Dans l'univers du troisième millénaire, voué à un bain d'énergie et au règne des « mutants supérieurs » le créateur ne se heurtera plus à aucun obstacle technique. Il n'y aura plus de problème de réalisation. L'art sera le langage de l'émotion pure, synthétique et souveraine, le langage de la communication directe entre les individus perceptifs.(...)
C'est à travers la couleur pure qu'Yves Klein devait d'abord matérialiser ses intuitions sensibles et mettre en œuvre un mécanisme de perfection extra-lucide, un langage psycho-sensoriel entièrement affectif échappant au contrôle de l'intelligence raisonnée.
in Pierre Cabanne, Pierre Restany, l' Avant-garde au XXè siècle, Balland éditeur 1969.
La couleur pure, le fameux bleu Yves Klein !
RépondreSupprimerRelisons à ce propos l' analyse de pierre Restany :
RépondreSupprimer" L'époque « bleue », inaugurée officiellement en janvier 1957 par une exposition milanaise, contient déjà en soi les germes de son propre dépassement. Dans la poursuite de l'absolu, le Bleu apparaît déjà à Klein comme une approche nécessaire mais dépassée, une parure superflue de la réalité cosmique, qui est infinie : cette énergie immatérielle se suffit à elle-même. Il s'agit d'en prendre et d'en assumer la conscience. Ce sera la fameuse exposition du Vide en 1958. Deux mille personnes viennent vernir les murs nus de la galerie Iris Clert.
Que faire, après être passé du Bleu au Vide? Loin de céder au vertige de la néantisation, Yves Klein réagit en force, répondant à l'appel d'une vocation prométhéenne qui correspond aussi à un retour à l'humanisme universel, dans la tradition cosmogonique des Rosé-Croix : l'artiste retrouve dans la trilogie des couleurs de la flamme du feu, bleu, rosé et or, l'expression de la synthèse universelle. Il revient à la monochromie et au bleu, mais aussi au rosé qu'il fixe dans un ton carminé, et à l'or qu'il traite à la feuille. Sa vision cosmique s'exalte : il intègre bientôt à sa création toutes les manifestations des forces élémentaires. Il emploie les « pinceaux vivants » dans ses Anthropométries, qui sont des empreintes sur papier de modèles nus préalablement enduits de peinture bleue (1). Il annexe les intempéries de la nature : il peint la pluie en bleu, sortant sous l'orage et pulvérisant le pigment pur en très forte émulsion dans l'air : les gouttes d'eau ainsi « imprégnées » à hauteur d'homme inscrivent en arrivant au sol leur image colorée sur une toile posée à plat par terre (« Cosmogonies » de la pluie)
.1. La première exécution publique d'Anthropométrie eut lieu à Paris
le 9 mars 1960 dans les locaux de la galerie internationale d'Art contemporain. Trois femmes nues opéraient sous les ordres d'Yves Klein et fixèrent leurs empreintes sur de larges papiers étendus par terre ou collés aux murs, tandis qu'un orchestre exécutait la « Symphonie monotone » (conçue par Yves Klein en 1949 et enregistrée par Pierre Henry en 1957). Au cours du débat qui suivit, Yves Klein eut un mot significatif, en réponse à une question de Georges Mathieu : « La peinture, c'est la bonne santé ! »
Versus
RépondreSupprimerA través de los interesante comentarios y el texto he aprendido mucho de este pintor Klein, sus colores son magnificos!!
@Carmen Troncoso,
RépondreSupprimerMerci de votre concise appréciation et un très bon week-end !
klein
RépondreSupprimernom qui claque
bleu inaudible
rose d'envie
bleu chromo
en monobikini
sur la croisette à Cannes
sonotone des béquilles et des jours uniformes
oh la belle bleue
sur papier blanc
lettre d'adieux
Bonsoir Versus, regardons Yves KLEIN : placer le (plein) mouvement en faisant le vide
RépondreSupprimer► PARTIE 1 (*) :
« Il salue, sa main droite agrippe l'adversaire au revers du kimono. Déséquilibre avant, arrière, léger mouvement de hanche, son partenaire se plie légèrement en tirant vers le côté. Commence alors une série de déplacements marqués par le frottement sur le tapis. En bordure du tatami, assis en position d'attente, les élèves suivent la rencontre. Tour à tour, le maître les invite. Ils sont prétendants au titre de ceinture noire. Soirées d'entraînement intense, chacun donne le meilleur de lui-même : ''Placer le mouvement en faisant le vide'', cette directive revient à l'enseignement de chaque séance. Ce soir, il faut rentrer dans la voie pour ne plus sentir, et n'être que le mouvement lui-même. Ne plus sentir tous ces petits détails, ces indices qui permettent de placer une prise, c'est pouvoir intégrer à soi le comportement de l'autre, ne faire plus qu'un. Mais, dès lors qu'on ne forme qu'un, où est la victoire ? Etre à la fois le projeteur et le projeté relève d'une esthétique de l'espace dans laquelle le combattant se retrouve face à lui-même. Il est le huitième à ''tirer'' avec le maître. C'est un honneur d'être dans cette série qui confirme un stage de qualité. Avec une fulgurance qui semble gommer tout déplacement, un ''Ippon Soenagué '' est placé. Le mouvement emporte l'élève. Seul, un petit cri expulsé par le professeur marque l'instant où, sans doute, tout s'est trouvé inscrit.
''Si l'on devient comme un miroir, ceux qui vous regardent se voient en vous. On est alors invisible ''.
Parfois, il arrive au maître de terminer ses entraînements par une citation, un thème à méditer. Ce soir, Yves a choisi de proposer un extrait de ses propres réflexions. Il est, dans ces années cinquante, l'une des cinq ceintures noires qui, en France, arborent leur 4e Dan. Au Japon, il avait appris le vrai judo, celui de l'effort soutenu qui donne au corps un savoir qui ne passe jamais par l'intellect. Sensibilité pure de la matière, où l'espace est perçu pleinement dans le vide qui l'entoure. Sculpture du vide ?
(SUITE . . . ► PARTIE 2 (*))
(*) Le nombre de caractères autorisés par message contraint à deux messages consécutifs !
► PARTIE 2 : regardons Yves KLEIN . . . ( S U I T E )
RépondreSupprimerPar petits groupes, les judokas quittent le dojo. Lui, longe le périmètre de la salle, en s'arrêtant de temps à autre pour caresser le mur. Au Kodokan, à Tokyo, il s'était promis d'avoir un jour son propre dojo, mais bleu, d'un bleu profond. L'idéal serait d'en construire un en verre, au fond de la mer. . . Ce bleu qu'il ressent si profondément, il l'exprime aussi en réalisant de grandes toiles bleues, des monochromes. Oui . . . une grande salle bleue dans laquelle il peut pratiquer son judo, fonder son école. Mais déjà des difficultés ! La Fédération française, lasse et inquiète de ses exigences, refuse d'homologuer ses grades obtenus au Japon. Peu importe ! S'il le faut, il créera sa propre fédération. Directeur technique pour l'Espagne, il possède là un atout important sur lequel il place des perspectives futures . . .
La porte d'entrée n'est pas fermée. Il la pousse du bout des doigts et se dirige tout droit, vers le fond du couloir. Dans un recoin, un livre ''Les Rose-croix'' par Heindel repose sur un tas de poudre bleue amassée au milieu d'un drap blanc posé sur le sol. Il s'agenouille, prend un peu de poudre dans ses mains et le répand sur le livre. A cet instant, la porte du salon s'ouvre, un homme s'approche, regarde par-dessus son épaule. Sans se retourner, Yves parle : « Vois-tu Pierre, je mets ça en contact avec le livre. Après chaque entraînement, je recouvre un peu le livre avec du bleu, les pigments prennent de la force que le monochrome libérera ».
(. . .)
-Texte de J. MAS-
Extrait de l'introduction ( dans le ton d'un roman ) du livre ''De la cage à mouches'' Z'Editions, 1987- de Jean Mas
Jean MAS est un Artiste de l'Ecole de Nice salué par Pierre Restany, en raison des différentes facettes de son oeuvre, comme synthétisant l'esprit de l'Ecole de Nice.
Ecole à propos de laquelle Yves Klein, en 1960, a dit « Je pense que l'Ecole de Nice est à l'origine de tout ce qui se passe, depuis dix ans, en Europe. »
Bonsoir, Versus, avec amitié.
Isabelle Dalbe
Merci de ce prolongement laurence, avec les mots " bleu " de votre univers tout personnel.
RépondreSupprimerTrès bon week-end à vous!
Merci de votre précieuse contribution Isabelle Dalbe !
RépondreSupprimerCette précision sur le début du judo en France, Klein en fait intégralement partie. Je me souviens du début des années soixante, mon extrême jeunesse, tout le monde parlait d' inscrire les enfants au judo, nouveauté sportive en France !
...Pour revenir plus précisément à Yves Klein et à l' interprétation de son œuvre, et sans trop rentrer dans les détails de spécialistes, on sait maintenant que l' influence chez Klein de Heindel ( rose croix ) est vivement contrebalancée de Thomas McEvilley à Restany, puis Nicolas Charlet, par la " double typologie Delacroix/Bachelard ", comme la nomme N. Charlet.
...
"
Si les écrits de Delacroix, le « Grand Artiste », sont le reflet d'une vie intense, le miroir n'est encore qu'une illusion. La vie se suffit à elle-même, . L"artiste n'est ni un producteur d'artefacts, ni même un écrivain sur l'art, il est, dans le seul fait d'exister, une œuvre d'art. Etre peintre plutôt que faire de la peinture, tel est le credo d'Yves Klein ( 28 ). La représentation est bannie.
Ce qui vaut pour le judo (« Le vrai judoka pratique en esprit et en sensibilité pure [alors que le « judoka ordinaire » pratique de manière « physique »] ), et pour la poésie (« un poète qui n'écrit pas de poèmes est bien plus dans la poésie qu' un poète qui conclut toutes ses "pontes" noir sur blanc(30) ») vaut aussi pour la peinture (« c'est indécent et obscène de matérialiser ou d'intellectualiser. C'est déjà assez sensuel dans l'abstrait de vivre consciemment la poésie ou la peinture ou l'art tout court. »). En définitive, Klein franchit les limites de la forme à travers le langage de la vie :
« Les " peintres et les poètes " véritables ne peignent ni n' écrivent des poèmes. Ils sont tout simplement des peintres et des poètes à l'état civil. Leur présence est le seul fait qu'ils existent comme tels, c' est leur grande et unique œuvre et là on revient ou plutôt on atteint au chef-d' œuvre, non pas comme ces peintres d'aujourd'hui qui battent monnaie en produisant leurs tableaux au lieu de les peindre.
Un peintre doit peindre un seul chef-d'œuvre : lui-même constamment et devenir ainsi une sorte de pile atomique, une sorte de générateur à rayonnement constant qui imprègne l'atmosphère de toute sa présence picturale fixée dans l'espace après son passage. Ça c'est la peinture, la vraie au vingtième siècle : l'autre, c'était autrefois les exercices justifiés d'étalage et de travail d'introspection.
La peinture ne sert qu'à prolonger pour les autres le "moment" pictural abstrait d'une manière tangible et visible(32) »
( 28 ) A l'opposé, Harold Rosenberg écrit : « C'est le "faire" et non la chose faite qui constitue
"l'œuvre" » (Harold Rosenberg, La Dé-définition de l'art, Nîmes, éditions Jacqueline Cham-
bon, 1962, p. 63).
Yves Klein, Réflexions sur le Judo, le Kiaï, la Victoire constante. Archives Klein, M21.14.
30. Yves Klein, « Par la couleur [...] », op. cit.
32. Yves Klein, « Quelques extraits de mon journal en 1957 », Venise, samedi 7 septembre 1957, Mon Livre, op. cit.
Versus, je vous remercie pour toutes ces réflexions très intéressantes et bien documentées auxquelles il est ensuite possible de se référer pour aller plus loin.
RépondreSupprimerJe retiens plus précisément « Les " peintres et les poètes " véritables ne peignent ni n'écrivent des poèmes. Ils sont tout simplement des peintres et des poètes à l'état civil. Leur présence est le seul fait qu'ils existent comme tels, c'est leur grande et unique œuvre et là on revient ou plutôt on atteint au chef-d' œuvre (. . . ) ».
Ce qui (reviendrait) revient à dire que la manifestation de l'oeuvre picturale ou poétique serait (est) l'intime conviction (sentiment tatoué ?) du peintre / poète à avoir vocation à être de ce souffle; ceci en son fors intérieur, et projeté, en temps utile, à l'éveil des regardeurs. L'intime conviction, émanant du ''maître'', devant ensuite rayonner dans l'espace et le temps uniquement par l'instrument oral (jouant médium) qui l'inscrit en permettant la connaissance, la reconnaissance, la mémoire et la transmission du chef-d'oeuvre.
Alors, magistral coup de balai à toutes les expressions concrètes (traces) matérialisées sur supports (indifférenciés), celles-là et ceux-ci, de toute façon, très fragilisés par et à l'échelle du temps.
Le peintre / le poète, ce serait (pourrait) être alors cet être agissant, monté sans jamais en descendre, dans des nuages audacieux ouverts à la lumière de l'éclairage de peindre et poétiser avec le seul pinceau / plume de son état civil brut, et ce à temps complet revendiqué. Ce qui (reviendrait) revient, si cela ressort du désir obstiné et nourri de l'interressé, à faire de la (sa) vie un art pictural ou poétique : les racines de la vie d'artiste / d'auteur, en perpétuelle conception de la grande Oeuvre unique, pendues aux racines de la vie foncière, et richement enchevêtrées. Puisque Y. Klein disait : « La vie, la vie elle-même qui est l’art absolu ».
A propos de coup de balai, Klein aurait été alors probablement enchanté des absences de coups de balai qui balayèrent, à proprement parler, la fin de sa rétrospective de 1983, au Centre G. Pompidou (*). Celle-ci, écourtée à compter du 19 mai, tourna alors, non plus autour de ses oeuvres dont on ne pouvait en conséquence plus voir la(les) couleur(s) en peinture, mais essentiellement sur son nom servi à demeure. Cette grande exposition avait en effet pour titre exclusif ''Yves Klein''. Mention identitaire du TOUT entendu en un nom.
(*) Yves Klein - 3 Mars-23 Mai 1983, - Paris - , Centre Georges Pompidou – (Exposition qui fut fermée prématurément le 19 mai faute de personnel d'entretien pour assurer le nettoyage du sol alors que des saletés jonchaient le sol) ► SOURCE de l'information : lettre d'humeur humoristique de Jean Mas, du 3 juin 1983, adressée au service d'entretien du Centre Georges Pompidou.
SUITE SUR MESSAGE SUIVANT
► SUITE DU MESSAGE PRECEDENT . . .
RépondreSupprimerPour ce qui est de ma réflexion en matière de poésie, j'aime ces notes de Joël GAYRAUD :
« C'est Jacques Vaché qui a donné la plus simple et la plus élémentaire illustration de ce dont Giorgio Agamben fera bien plus tard la théorie sous le nom de singularité quelconque :
'' Je serai aussi trappeur, ou voleur, ou chercheur, ou chasseur, ou mineur, ou sondeur . . . ''
ou encore
'' Mon rêve actuel est d'être membre d'une société chinoise sans but et secrète en Australie ''.
On n'a jamais revendiqué avec autant de désinvolture la parfaite indifférence à toute identification. Superbe mépris de tout prédicat social qui montre combien ce que la scolastique médiévale appelait '' quodlibétalité '' est cette surprenante qualité qui dénie toute prédication. En effet, dans l'expression latine ens quodlibet, le deuxième terme n'est pas un prédicat, mais une forme verbale. L'étant-ce-qu'il-lui-plaît est à l'évidence un faire libre, le fay ce que voudras des Thélémites, ou encore un acte de poésie ». (*)
Cet éclairage sur l'acte de poésie, s'appuyant sur l'indifférence de l'être à toute identification, est à mon sens, aussi une voie d'accéder au chef-d'oeuvre, ici poétique, pour celui-ci, celle-là et tutti quanti.
(*) La peau de l'ombre – Joël GAYRAUD – Editions José CORTI
Bonne soirée, Versus.
Isabelle Dalbe
D' une visée poétique très lucide, que votre prolongement Isabelle Dalbe !
RépondreSupprimerLorsque l' exigence d' écriture rejoint une telle exigence d' être peintre, que puissions-nous alors atteindre la plénitude !
Le prince Yuan de Song voulait faire exécuter certains travaux de peinture. Des peintres se présentèrent en foule; ayant effectué leurs salutations, ils s'affairèrent devant lui, léchant leurs pinceaux et préparant leurs encres, si nombreux que la salle d'audience n'en pouvait contenir que la moitié. Un peintre cependant arriva après tous les autres, tout à l'aise et sans se presser. Il salua le prince, mais au lieu de demeurer en sa présence, disparut en coulisse. Le prince envoya l'un de ses gens voir ce qu'il devenait. Le serviteur revint faire rapport : "Il s'est deshabillé et est assis, demi nu, à ne rien faire." "Excellent, s'écria le prince. Celui-là fera l'affaire : c'est un vrai peintre."
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