Jean Marie STAIVE, original sur papier. |
Sachant que Paul Klee dessinait constamment, couvrant de configurations de traits toute surface disponible, des menus de restaurants aux marges de journaux, on peut difficilement s'empêcher de supposer que c'était là sa façon de gérer un sentiment interne d'être envahi, de débordement. Cet artiste se plaignait, justement, d'être regardé de toutes parts ; même en voyage à la campagne, il disait : « Ce n'est pas moi qui regardait la forêt », puisque « ce sont les arbres qui me regardaient ». Ce sentiment d'être « submergé », ajoutait-il, était peut-être la raison pour laquelle il devait peindre.
Il est tout à fait possible d'envisager de la même façon les pratiques prolongées de création de nombreux artistes. On pourrait penser, par exemple, au caractère presque automatique que les artistes attribuent souvent à leurs propres manières de travailler.
Il y a ici une sorte de circuit qui va du côté envahissant de l'Autre à l'usage de son propre corps pour réaliser des inscriptions. On peut choisir de considérer cela comme une forme de décharge, mais barrière ou limite serait peut-être plus juste. Et le moment essentiel dans l'acte d'inscription n'est-il pas, après tout, celui où l'on termine une ligne, une marque, un coup de pinceau ? Cela relève moins d'un art de représenter que d'un art d'arrêter.
Darian Leader, Ce que l' art nous empêche de voir, Payot éditeur.
je n'avai pas regardé assez attentivement cette oeuvre, mais on y voit pas mal de visages pas très avenants ..et je peux comprendre que l'on ait pas envie d'etre regarder de cette façon...
RépondreSupprimerBien vu ***Isabelle *** !
RépondreSupprimerLes entrelacs nous enlacent de drôles de figures, volontaires souvent, involontaires parfois et l' écriture avance souvent avec angoisse, souvent avec sérénité son pion rivé à l' existence de l' exécutant.
Après, chacun interprète à sa façon. Les têtes peuvent être protectrices, elles jouent leurs jeux bien à elles. Le plus dur reste le moment de les quitter .
Bonne soirée !
"Où est la limite de l'inspiration à la folie, de la stupidité à l'extase ? Ne faut-il pas pour être artiste voir tout d'une façon différente de celle des autres hommes ?"
RépondreSupprimerFlaubert.
La DLUO est inscrite sur l'oeuvre attention aux contrôles.
Vous avez raison Bourdon, être artiste c' est " voir tout d' une façon différente des autres hommes "? Cela se nomme originalité, personnalité, la " patte "aussi.
RépondreSupprimerJ' aime bien aussi le mot idiosyncrasie et l' idiotês grec.
D' ailleurs c' est J.P. Sartre qui a écrit sur Gustave Flaubert que vous citez, son Idiot de la famille.
La DLUO qu' est-ce ?...Je suppose qu' il s' agit de la date de péremption ? ( le support de l' œuvre est effectivement un emballage alimentaire et j' ai mangé son contenu !)
Merci de la visite !
Un autre fléau de l' artiste est l' angoisse du commencement ou de la page blanche, car pour celui d' arrêter, j' ai la solution toute trouvée: n' arrêtez jamais , créez à l infini,voilà.Bonne soirée!
RépondreSupprimerVous avez raison orfeenix, créer c' est parfois compliqué, au début, à la fin et souvent pendant le processus !
RépondreSupprimerMais l' envie de continuer, de recommencer est toujours la plus forte. J' ai la chance de connaître un artiste de 95 ans et sa vitalité, la résolution dans ses projets m' étonnent toujours. C' est impressionnant et communicatif.
Cela permet d' être en vie...
Merci du passage !
Terminer à la ligne est un péché…
RépondreSupprimerVous ne croyez pas si bien dire TG !
RépondreSupprimerL' important étant d' attraper un gros poisson à la réalisation ...Et tout nous sera pardonné !
Rafraîchissant et très bel original !
RépondreSupprimerSinon il y aurait bien la ligne pointillée pour arrêter et pour découper selon ses envies.
Eh oui Bleu, la ligne en pointillé nous ramène à la ligne d' écriture !
RépondreSupprimerA savoir si la peinture commence là où s' achève l' écriture ?
La graphie n' est pas toujours en ligne droite, elle n' est pas seulement " orthographie ".
L' écriture fait parfois de très grands détours.
Elle musarde, batifole et se charge de tout un attirail de matières ramassées au hasard.
Les chemins de traverse en quelque sorte !
Superbe soleil en ce moment...
Bonne journée.
Décidément, Versus, votre blog m'enchante et je me demande quel personnage peut bien se cacher derrière votre clavier.
RépondreSupprimerCette forêt de visages, anonymes, est intrigante. Au premier regard, on ne distingue que les yeux. Ce n'est qu'en observant plus longuement que l'on remarques 1000 différences. J'aime votre choix de couleurs créant une harmonie à elles seules, sans se soucier des dessins.
Concernant le griffonnage, je suis tout à fait d'accord avec vous. Le fait de ne pas arrêter de créer maintient notre cerveau "en alerte". Il permet le flot de l'imagination de continuer à fourmiller. Comme si le geste libérait la pensée. Je l'ai tester moi-même plusieurs fois. Qu'il est difficile de se remettre à créer après plusieurs mois en "pause"! J'ai l'impression que rien ne me conviens plus, je me juge et pose des barrière. Le griffonnage, les croquis, etc ... permettent justement de ne pas "perdre" la main.
Bonne fin d'après-midi.
Lise
Un fil à dérouler pour retrouver son chemin dans les arts... Merci encore un fois...
RépondreSupprimerà première vue! je n'avais pas vu les visages...et tous ces yeux qui me regardent!...la graphie relie, délie...un vrai moucharabieh ou jalousie?
RépondreSupprimerVous savez Lise, je suis comme tout le monde. Avec quelques passions, comme tout le monde. Mais je n' ai jamais abdiqué pour une vie de confort conventionnelle...des amis peintres, écrivains et poètes ont fait la même chose. Cela n' a rien d' extraordinaire et les projets abondent. (Un jour je mettrai en ligne ma bio-biblio-picturographie...mais je ne suis pas encore à la retraite ! ) Et puis les cases ou les cages, ce n' est pas mon truc.
RépondreSupprimerEt oui encore, écrire ou peindre cela peut s' organiser comme une chorégraphie mentale et physique ! Cela me fait me souvenir d' un cas particulier d' un peintre qui ne parvenait plus à commencer ses tableaux, il se bloquait toujours sur le geste initiateur. ( Le psychiatre François Gantheret décrit ce cas dans son " Moi, Monde, Mots, Gallimard ..)
Et je pourrai aussi vous dire comment j' ai compris pourquoi à une époque je dessinais des têtes de " nœuds ".
Le geste est une véritable geste.
Ici, soirée superbe après la chaleur du jour.Sûrement belle pour vous !
Bonsoir.
@ Ötli, depuis le fil d' Ariane...
RépondreSupprimerEt toutes les expressions concernant le fil...Quelque fois le résultat en matière d' art ne tient qu' à un fil !
Vos mots exotiques m' enchantent Gwendoline.
RépondreSupprimerPour la graphie " qui lie et délie ", me vient à l' esprit une belle formule- titre de Christian Dotremont : " Parfois je me perds en détail pour reprendre pied ." ( 1965 )
Ne pas perdre le fil, en quelque sorte !
Bonne soirée !
COUCOU et bien je me demande déjà si je vais trouvé le début!!! Mais je veux bien essayer!Je te souhaite une belle soirée
RépondreSupprimer@ Françoise,
RépondreSupprimerC' est le début de la fin, alors ?
Bonsoir Versus!
RépondreSupprimerNous avons reçu le soleil dont vous avez bénéficié hier. Quel bonheur de voir le printemps revenir!
Concernant nos vies, qu'est-ce que l'extraordinaire, qu'est-ce que la normalité? La définition doit être une histoire de case ou de caches ;-)
Quant à la richesse, la seule qui, à mon sens, puisse être considérée comme richesse est celle du coeur. Et de l'âme.
Cependant, dans notre communauté d'artistes, j'ai l'impression que les parcours sont plus tortueux. Donc souvent très intéressants.
Très belle soirée à vous!
Lise
Cela existe t-il, une communauté d' artiste Lise ? Je connais pas mal de louves et loups solitaires ! Chacun dans son monde...on fait quelques fêtes, mais sans mondanité, plutôt la ferveur en évitant les raconteurs (euses ) complaisant de soi.
RépondreSupprimerVous avez raison, les routes sont tortueuses, mais avec des arrêts d' étonnement, de surprise et de stupeur. Pratiquer une activité qui vous absorbe, c' est une façon de se centrer sur soi et de l' offrir sans obligation aux autres.
Remarquez que j' ai écrit " activité ", car je ne privilégie nullement les arts " officiels " . On trouve des jardiniers hors-normes, des fabricants de machines à rien, des bâtisseurs de l' inutile et des jean-foutre industrieux...
Belle fin de soirée à vous !
non parlo e stento a capire il francese però voglio farti i complimenti:il tuo blog mi piace un sacco!!!!
RépondreSupprimerMa i tuo è un vero trip !!
RépondreSupprimerGrazie della visita!
Loving the playful colors and patterns!
RépondreSupprimerMany thanks about your kind appeciation Kristin !
RépondreSupprimerI visit your blog and i appreciate it a lot.
You know, you are very welcome here and we are awating your experienced eyes as soon as possible !
C'est magnifique!!!
RépondreSupprimerthanks for visiting!
Merci de votre passage et de votre appréciation enthousiaste Elena !
RépondreSupprimerA bientôt !
Plein de jeux et de yeux, versus! J'aime bien l'idee du fil - qu'est-ce qu'on y trouvera au bout?
RépondreSupprimerTrès certainement le bord de la feuille sera notre frontière, notre rupture, Deborah, je n' espère pas le précipice !
RépondreSupprimerPeut-être alors, pourrions-nous imaginer le fil en forme de corde de rappel ?
Cela offre une possibilité de revenir..( Tiens, comme la bobine de Freud, l' aller et le retour de la jouissance " artistique ? ")
Bonne fin d' après-midi !
Serait-ce dire que l’artiste est comme désapproprié de son propre regard, tout imprégné qu’il est du regard de l’extérieur ?
RépondreSupprimerL’art comme un débordement, une pulsion irrépressible d’agir, un peu comme l’écriture.
Quand enfin on s’arrête, peut-être a-t-on réalisé quelque. Mais qui décide que ce quelque chose représente un « objet d’art » : l’artiste ou celui qui regarde cet objet ?
Vous évoquez plusieurs questions Saravati qui touchent tout à la fois les modalités d' élaboration d' une œuvre d' art et la possibilité de désignation de ce qu' est à proprement parler cette même œuvre d' art .
RépondreSupprimerVaste et essentielle question !
Je pense pour ma part, que l' artiste demeure dans l' activité complexe de son regard qui est un aller retour regardé/regardant, une gestuelle par laquelle la personnalité entière de l' artiste agi . Lui seul connait le moment de l' arrêt, le moment du fini ( pour cette fois ci, car il va certainement recommencer, se remettre à l' ouvrage... )
En ce qui concerne ce que vous nommez " objet d' art ", chaque époque de l' histoire en a donné une définition sociologique particulière et spécifique selon le continent.
Certaines civilisations ne conçoivent même pas cette notion " d ' objet d' art " de notre occident judeo- chrétien.
Mais je laisse ouvert le débat de ce que qui est art ou pas pour un objet.
Excellente fin de soirée !
Terminer une ligne?
RépondreSupprimerDites donc! Une ligne de quoi ?
Qu'est ce que l'art?
Ca sert à passer le temps…
Question de temps au fond, avant de "terminer"… d'en finir
Pendant ce temps-là,
On ne fait pas de bêtises…
J' y ai pensé TG...et vous l' avez écrit !
RépondreSupprimerJ' espère que vous ne n' êtes pas entré en pénitence !
On parle bien de repentir en peinture n' est-ce pas ?
D' autres nous expliquent qu' il faut sans cesse se remettre à l' ouvrage ( affaire de fil )..." Post ...animal triste ? "
Dans ses " Lettres à un jeune poète ", Rainer Maria Rilke opère un décisif rapprochement :
" La vie créatrice est si près de la vie sexuelle, de ses souffrances, de ses voluptés, qu' il n' y faut voir que deux formes d' un seul et même besoin, d' une seule et même jouissance ".
Bonne journée !
@TG, désolé pour le " ne n' êtes " !
RépondreSupprimer@ TG, " L' art, ça sert à passer le temps."
RépondreSupprimerNe peut-on dire aussi que l' art est une passion inutile ?
l'art est inutile tout court, c'est pour cela qu'il est … inutile…
RépondreSupprimerMais dans notre monde, nous n'avons plus le droit à l'inutilité, c'est sans doute pour cela que nous avons supprimé Dieu…
et puis nous n'avons plus le droit la beauté, du reste vous avez remarqué comme moi, à quel point nous l'avions chassé de notre environnement… inutile. Je l'ai encore constaté ce matin en regardant une "architecture urbaine" récemment terminée.
Ce commentaire est lui-même inutile, mais comme disait ma grand-mère : "un tiens vaut mieux que deux tu l’aura!" (remarquez au passage à quel point j’ai soigné ma chute !, j’en suis tout retourné et je retourne me coucher)
Et puis j'ai un mal de chien en ce moment avec mon modèle… je vais acheté un gourdin pour qu'elle arrête de bouger, non mais!
RépondreSupprimerMais faite quelque chose…
Petite réflexion vespérale, cher TG, de cet " inutile ", qui cependant demeure une passion tenace et obsédante :
RépondreSupprimer" Comme le moi, l'art est sans qualités et cela explique, outre ce qui en fait une passion inutile, comme Sartre le suggérait de l'homme lui-même, les paradoxes auxquels il se prête et donne lieu. Il en va aussi, significativement, comme du portrait. D'un portrait, on peut dire toutes sortes de choses, excepté ce qui en fait le portrait de x ou de y. Comme l'observe Wittgenstein : « Considérez un visage - c'est l'expression de ce visage qui est importante, et non sa couleur, sa taille, etc. ». « Soit, donnez-nous l'expression sans le visage.» L'expression d'un visage n'est pas un effet de ce visage. »
Les raisons sont tout à fait semblables à celles qui nous font échouer à inclure le moi dans la description que je peux donner d'une personne, même si les passions qu'elle éveille chez d'autres peuvent parfois s'y fixer. On se heurte à une difficulté de même nature lorsqu'on entreprend de dire ce qui fait d'une chose une oeuvre d'art. On peut toujours se lancer dans une énumération de prédicats. De L'embouchure de la Seine, de Monet, je peux dire, à l'instar de Paul Mantz, dans la « Gazette des Beaux-Arts », que « le goût des colorations harmonieuses, le sentiment des valeurs, une manière hardie de voir les choses, sont des qualités qu'il possède à un haut degré. » Je pourrais aussi produire une description du tableau qui, tout en faisant appel à des propriétés physiques et perceptuelles, irait jusqu'à une étude précise des couleurs et de l'usage des couleurs, tout en mobilisant l'éclairage d'un certain nombre de catégories relatives au style de Monet à cette époque, aux finalités poursuivies, etc. Mais tout ce que je pourrais décrire de la sorte ne me permettrait pas - comme précédemment pour le portrait - de dire plus que ce qui entre dans un certain cadre de conventions et donne aux propriétés décrites un statut générique, ne différant pas, ontologiquement parlant, des propriétés susceptibles d'entrer dans la définition d'un objet quelconque, c'est-à-dire un artefact, même si ces artefacts que sont les œuvres d'art se voient traditionnellement reconnaître un prix plus élevé que beaucoup d'autres.
( à suivre)...
...( suite et fin ) :
RépondreSupprimerOn touche ici à ce que d'aucuns tiennent pour une énigme, celle qui s'attache à toute passion, car ce qu'aucune description ne semble pouvoir intégrer semble alors se perdre dans l'ineffable. Je peux toujours dire que j'aime Turner pour ses jaunes ou pour la façon dont il dissout ses sujets, comme j'aime une personne pour ses yeux, son élégance, son humour ou ce que l'on voudra. Ce qui les rend à mes yeux irremplaçables, propres, n'entre dans aucune description finie. Mais je n'ai aucune raison d'en concevoir de l'amertume ni de la déception, car la passion est à ce prix."
Jean Pierre Cometti,Université de Provence, extrait de son article " L' art est une passion inutile " in Revue francophone d' esthétique, titrée Évaluer l' œuvre d' art,novembre 2003-avril 2004.
C'est génial!
RépondreSupprimerindefectible...
Merci de votre passage et de votre fidélité que j' apprécie à cet instant.
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